Technique de tracé
Tous les tracés sont établis sur la base d’éléments fiables, comme par exemple les planches de reproduction originales fournies par les musées, des scans, posters et relevés dimensionnels compilés par des experts. Lorsque c’est nécessaire (c’est souvent le cas), les images sont redressées par des moyens digitaux pour respecter strictement les dimensions hors tout (mise à l’échelle) et les proportions X/Y, trop souvent victimes des distorsions optiques des appareils photos.
De plus, plusieurs siècles sont passés par là et l’état actuel des moules tels qu’on les voit aujourd’hui est sans aucun doute assez différent de leur état d’origine : usure, éclats, déformations… Pour cette raison, reproduire les moules tel quel n’aurait pas vraiment de sens car les violons qui en sortiraient seraient assez peu conformes à ceux qu’ils ont généré au XVIIème siècle. Les tracés ont donc été «restaurés» pour reproduire le plus fidèlement possible les moules originaux tels qu’ils devaient être à l’époque de leur utilisation : les contours ont été retendus pour survoler les zones usées ou abîmées, et comparés aux tracés géométriques théoriques ayant servi à les créer. Dans tous les cas, le but est de créer un moule parfaitement fidèle à l’intention d’origine du maître.
Suivant votre projet de construction, vous pouvez choisir entre deux types de tracé :
Tracé «asymétrique»
Il est constitué d’une courbe spline très tendue qui suit le plus fidèlement possible le contour du moule original mais en survolant les zones d’usure pour ne pas les reproduire. Le but de ce tracé est d’obtenir une réplique précise du moule tel qu’il était à l’époque de son utilisation tout en conservant ses asymétries et ses imprécisions. C’est donc le choix pertinent pour les reproduction d’instruments célèbres où pour les luthiers qui souhaitent conserver les subtiles dissymétries qui font le charme des instruments anciens. Attention. vous pouvez être dérouté par le fait que les axes de construction apparaissent légèrement «de travers» et décentrés par rapport au contour : c’est tout à fait intentionnel et représentatif des imperfections du moule original. Mais vous devrez être capable de les interpréter subtilement pour en tenir compte dans la suite de la construction, notamment pour aligner le manche, placer les ouïes et tracer le contour final de la table et du fond dans les règles de l’art.
Tracé «géométrique»
Il correspond à une reproduction géométriquement parfaite du moule. Les axes de construction sont parfaitement centrés et perpendiculaires et le contour reproduit la succession exacte d’arcs de cercles et les proportions correspondants aux règles de tracés connues. Le but de ce tracé est de produire un moule sans défaut, tel qu’aurait pu le faire Stradivari ou ses collègues s’ils avaient manié la CAO et l’usinage à commande numérique. C’est donc le choix à privilégier pour créer des instruments géométriquement «parfaits» ou lorsque vous souhaitez appliquer vos propres déformations à la couronne d’éclisse pour imiter celles d’un instrument connu. Bien sûr, ces moules sont plus faciles à exploiter pour la suite de la construction car tout est parfaitement aligné et symétrique, vous n’avez pas de question à vous poser.

Dans certains cas particuliers (notament pour Guarnerius del Gesu et les Amati), les moules originaux n’existent plus. Pour ceux là, le tracé n’est disponible qu’en version géométrique et il a été établi sur la base de posters et de CT-scans d’un panel de violons réputés fabriqués avec le moule concerné.